QU’EST-CE QUE L’UCHRONIE ?

L’uchronie – Qu’est-ce que c’est ? 🤔

L’uchronie est un néologisme créé au XIXe siècle par Charles Renouvier, philosophe français, entré dans le dictionnaire français en 1913 et dans le Nouveau Larousse Universel en 1948. Ce mot est fondé sur le modèle de l’utopie : la lettre u- est un préfixe de négation et le mot « chronie » vient du grec « chronos » qui signifie « temps ». Étymologiquement, l’uchronie est donc « un non-temps », un temps qui n’existe pas ou qui n’a pas existé, autrement dit, une uchronie est un récit d’événements fictifs qui a pour point de départ une époque ou un évènement historique. L’Histoire en elle-même devient un évènement déclencheur au récit. Par exemple, nous pourrions imaginer une histoire en partant du sujet suivant : « Et si les alliés n’avaient jamais débarqué… » et écrire ainsi une œuvre uchronique.

Régis Messac, écrivain du début du XXe siècle, dit, en 1936, que l’uchronie est une « Terre inconnue, située à côté ou en dehors du temps, découverte par le philosophe Charles Renouvier, et où sont relégués, comme de vieilles lunes, les événements qui auraient pu arriver mais qui ne sont pas arrivés. ». L’uchronie est donc le récit qui prend forme lorsque l’on imagine ce qu’il se serait passé si tel ou tel événement se serait passé autrement.

Même si ce néologisme date du XIXe siècle, l’uchronie – sans être ainsi nommée – existe depuis bien longtemps. L’exemple le plus ancien que nous ayons est « Histoire de Rome depuis sa fondation » de Tite Live, où ce dernier formule l’hypothèse qu’Alexandre Le Grand ait lancé une conquête à l’Ouest plutôt qu’à l’Est et aurait attaqué Rome au IVe siècle avant Jésus-Christ. En France, la première œuvre semble être le roman de Louis Napoléon Geoffroy-Château, beau-frère de Napoléon Ier, intitulé « Napoléon et la conquête du monde », où l’auteur part du postulat que Napoléon aurait fui Moscou avant le désastreux hiver 1812. Selon lui, l’empereur aurait eu assez de forces militaires pour conquérir le monde.

C’est en 1976 que Charles Renouvier publie son uchronie ; « L’utopie dans l’histoire » où il développe une Histoire de la civilisation européenne telle qu’elle n’a pas été mais qu’elle aurait pu être. Il met en évidence ce qui est appelé « le point de divergence », c’est-à-dire l’élément ou le moment qui fait basculer l’histoire dans la fiction. Une théorie nommée « Multivers » stipule que des points de divergences surviennent à chaque instant, à chacun de nos choix, créant sans cesse une multitude d’univers parallèles ayant chacun des conséquences différentes plus ou moins bonnes ou mauvaises et faisant entrer également en jeu la théorie de « l’effet papillon »[1]. Par exemple un univers se serait créé si les dinosaures n’avaient pas disparu et un autre si l’Empire Romain avait perduré, etc. Cette théorie est à la base d’une grande partie d’intrigues de livres dont se servent divers auteurs comme Pierre Pevel, mais également de nombreux scénaristes de films, de séries (comme ceux de la série télévisée « Fringe » de J.J Abrams), de comics ou de bandes-dessinées.

L’effet papillon est matérialisé par une chaîne d’événements qui se suivent les uns les autres et dont le précédent influe sur le suivant. Ainsi, on part d’un événement insignifiant au début de la chaîne pour arriver à une chose catastrophique (ou du moins très différente de la première) à la fin.

Et lorsque le changement évoqué dans un contexte historique est une source de magie, on parle d’Uchronie de Fantasy. C’est le cas d’histoires qui mêlent le roman historique à la fantasy. Ces romans reprennent des évènements historiques en y insérant des éléments surnaturels.

Pierre Pevel (« Les Lames du Cardinal », « Le Paris des Merveilles ») est un écrivain français adepte de ce genre littéraire. On peut également citer « Les Royaumes du Nord » de Philip Pullman ou encore « L’âge de déraison » de Greg Keyes.

Un super procédé pour laisser libre cours à notre imagination, vous ne trouvez pas ? Personnellement, je trouve ce procédé fascinant et tellement intriguant dans un roman.

Pour vous donner une idée de ce que donne le procédé de l’uchronie dans les romans, j’aime beaucoup citer les romans de Pierre Pevel et plus particulièrement la trilogie du « Paris des Merveilles » qui a été le sujet de mon mémoire de première année de mon Master de Recherches en Lettres Modernes. Je vous renvoie d’ailleurs à mon analyse sur son roman « Le Paris des Merveilles » (en cliquant ici). Dans ce roman Pierre Pevel s’adresse beaucoup aux lecteurs (de très nombreuses fois dans la trilogie) leur demandant la « permission » de changer l’Histoire, créant ainsi un lien intime avec eux et les mêlant à ces changements, les rendant complices – voire même co-créateurs – de ce monde parallèle qui n’a pas existé mais qui aurait pu exister. Enfin, il utilise un vocabulaire associé à l’utilisation de l’uchronie en posant la question : « Que se serait-il passé si » qui incite à l’imagination de nouveaux événements. Il donne une éventuelle explication à ces changements dans son quatrième de couverture : « une conjonction astrale propice » ou « un caprice du destin ». Et pour terminer, il propose aux lecteurs de se transporter « au début du XXe siècle, en France », époque où se déroule sa trilogie uchronique. En quelque-sorte, à travers ses mots, Pierre Pevel transforme son roman en machine à remonter le temps et, en plus d’indiquer explicitement l’uchronie de son intrigue, scelle le pacte de lecture avec son lectorat, qui ne cessera d’alimenter au fil de l’histoire par de nombreuses autres adresses à leur attention.

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